Le nouveau dispositif voté le 1er décembre par l’Assemblée Nationale en première lecture crée un délit spécifique au harcèlement en milieu scolaire et renforce enfin les missions des professionnels de la santé en milieu scolaire tout en souhaitant assurer une nouvelle formation des enseignants pour détecter et prévenir ces harcèlements.
Ce toilettage législatif était devenu indispensable si l’on s’en tient aux chiffres de la mission d’information du Sénat sur le harcèlement scolaire, qui précisent que 800 000 à 1million d’élèves seraient victimes de ce phénomène chaque année, ce qui correspond à plus de 10% d’entre eux. En moyenne, ce sont deux à trois enfants ou adolescents, par classe, qui sont stigmatisés, malmenés,
moqués et violentés.
Pour y faire face, la nouvelle infraction pénale prévoit que constitueront un harcèlement scolaire les faits de harcèlement moral commis à l’encontre d’un élève ou d’un étudiant, soit dans un établissement d’enseignement ou d’éducation, soit lors des entrées ou sorties des élèves ou dans un temps très voisin de celles-ci aux abords de l’établissement, soit par d’autres élèves ou étudiants dans le même établissement que la victime.
Ces faits seront punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsqu’ils auront causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours et de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende lorsqu’ils auront causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, et de dix ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende lorsqu’ils auront causé la victime à se suicider ou à tenter de se suicider.
Il reviendra à l’autorité judiciaire de mettre en œuvre cet aspect répressif de la loi, mais quels moyens nouveaux seront-ils donnés à la prévention du harcèlement ? La mention dans le projet de loi qu’une « offre de formation continue dédiée à l’identification et la prise en charge du harcèlement scolaire est proposée à l’ensemble des professionnels travaillant en milieu scolaire » apparaît bien faible…
En outre, il ne faudrait pas que cette nouvelle loi facilite et accentue la responsabilité des enseignants, trop souvent mise en cause par les parents d’élèves dans de tels drames pour défaut de surveillance ou de signalement…
Il est d’ailleurs à cet égard inquiétant de relever dans la présentation de la loi sur le harcèlement scolaire la mention suivante : « d’autre part, dans les affaires les plus graves de harcèlement scolaire, il arrive qu’un personnel scolaire ait initié ou alimenté les violences, ce constat est intolérable, d’autant qu’il salit notre système dans sa globalité alors qu’une incontestable majorité des personnels enseignants, administratifs et périscolaires sont dévoués à nos enfants et indispensables à leur développement »…
Il apparaît donc souhaitable de compléter ce projet de loi notamment en y insérant l’amendement qu’avait proposé L’Autonome de Solidarité dans la dernière loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République pour rendre plus efficace la poursuite des auteurs de dénonciations calomnieuses qui risquent d’être encouragés dans leur mise en cause injustifiée du monde de l’éducation.
Il reviendra au Sénat d’examiner cette loi en janvier 2022 pour une application à la prochaine rentrée scolaire…
Bâtonnier Francis LEC,
Avocat à la Cour